Je suis Byron Miller, concepteur de raid, je vais vous parler de l’instance de raid de la Salle des chaînes. Dans ce raid, nous faisons la rencontre de Desmina, et nous l’aidons à vaincre Dhuum, le dieu de la mort déchu qui avait été banni par les joueurs dans le premier Guild Wars®. Les dieux ont quitté la Tyrie, ce dernier tente donc de s’emparer du pouvoir.
Concevoir un boss de raid est un mélange stimulant de : « Quelle est la particularité de ce boss ? » et de : « Comment faire fonctionner cette particularité ? ». En général, ce processus se découpe en deux phases principales de développement : la préparation et l’implémentation.
Phase de préparation
Pendant la préparation, nous utilisons principalement Microsoft Paint, des blocs de papier et des crayons magnétiques, et toutes les figurines que je peux trouver sur le bureau de Crystal, lorsque je vais en salle de réunion. La phase de préparation et de documentation dure généralement quelques semaines, le temps d’établir la narration, l’apparence en jeu, les mécaniques qui structureront les combats, et les récompenses que nous aimerions offrir. Nous demandons à des représentants de toutes les disciplines de prendre part à ces réunions afin que, dès le début du processus, tout le monde puisse réfléchir aux éléments à ajouter pour faire des combats de boss des expériences cinématiques mémorables. Intégrer des boss tels que Dhuum, qui ont déjà une histoire et une apparence bien établies, dans le nouvel univers de Guild Wars 2 est un véritable défi. Les autres boss, comme Desmina, qui sont associés à peu de contenu, nous donnent davantage de liberté en termes de narration et d’esthétique. La relation entre Desmina et Dhuum (et Grenth) est en quelque sorte née de cette différence.
Un boss peut être amené à évoluer de manière considérable et rapide durant la phase de préparation, étant donné que nous n’avons pas encore commencé à implémenter la rencontre. Si, par exemple, Ben Arnold nous annonce : « J’ai ajouté une fonction qui permet de marcher au plafond, c’est vraiment simple à intégrer. », il y a de grandes chances pour qu’on ait envie d’imaginer une rencontre qui utiliserait cette nouvelle technologie. (Remarque : ce n’était qu’un exemple, nous ne pouvons pas réaliser cela, mais Ben est un véritable sorcier et je parie qu’il est imprégné de la Puissance des Brumes.)
À ce stade, nous n’avons pas encore commencé à mettre au point la rencontre, il est donc plus facile d’explorer différents chemins que lorsque la création est entamée.
ATTENTION : la suite de l’article contient des spoilers
Dhuum, en particulier, a fait l’objet de nombreux changements durant la phase de préparation du développement. Les illustrations conceptuelles sur papier ont fortement influencé l’idée d’enchaîner activement Dhuum, en plaçant notamment les joueurs dans les coins de la salle et en les enchaînant directement à lui.
Tandis qu’on élaborait les autres aspects de la conception, nous avons réalisé que le fait d’empêcher près de la moitié du raid de combattre le boss activement finirait par affaiblir des joueurs et exercer une pression injuste sur ceux qui devraient s’efforcer de compenser l’absence de certains rôles. Cependant, nous avons adoré l’idée que les chaînes de Dhuum impliquent activement les joueurs, et nous ne voulions pas que ces derniers se concentrent uniquement sur le boss pendant toute la durée du combat. Nous avons donc conservé ces concepts et les avons insérés à d’autres moments de la rencontre. Pour maintenir l’intérêt des joueurs vis à vis de l’histoire, nous avons mis au point des mécaniques stressantes pour les faucheurs de Grenth. Ceci nous a donné des raisons narratives et techniques palpitantes de pousser les joueurs à faire attention à leurs points de vie. Au cours de la phase finale, nous voulions que les joueurs rentrent pleinement dans leur rôle de redoutables faucheurs, en les laissant terminer le rituel et activer les chaînes magiques qui rendent Dhuum vulnérable et permettent de l’emprisonner.
Fin des spoilers… pour l’instant
Phase d’implémentation
Une fois que nous avons déterminé les actions du boss, il nous reste à concevoir les compétences que nous avons imaginées en nous appuyant sur la phase de préparation. Cela dit, le concept sur papier ne donnera pas forcément des résultats satisfaisants une fois implémenté. Certaines mécaniques qui semblaient fonctionner durant la préparation peuvent s’assembler de façon catastrophique. Prenons pour exemple les compétences que nous avions imaginées à l’origine pour Dhuum et qui ont nécessité des changements après l’implémentation.
ATTENTION : la suite de l’article contient des spoilers
Du papier au jeu, la compétence Massacre de Dhuum était trop semblable à celles que nous avions déjà conçues, et paraissait décevante par rapport aux compétences telles que Moisson de Dhuum ou Cycle cataclysmique. Pour résumer, elle n’avait pas assez d’impact. Avec l’aide de Ben et des créateurs de l’algèbre linéaire (merci à J. Willard Gibbs et Oliver Heaviside !), nous avons pu mettre au point une compétence démente, complètement inédite.
La compétence Massacre que vous pouvez voir en jeu est en fait une série de compétences qui se base sur diverses données variables personnalisées et génère de façon aléatoire des fissures terrestres maléfiques de plus en plus puissantes, d’où s’échappe une magie mortelle.
Après un certain nombre de modifications, voici de quoi nous sommes partis :
Pour arriver à ce résultat :
À environ un tiers de la conception du prototype d’origine de cette compétence, j’ai réalisé une chose essentielle : j’aurais dû me montrer plus attentif pendant les cours de maths au lycée. L’application pratique de cette matière dans le domaine de la conception de jeu est plus importante que je ne l’aurais cru à l’époque.
Les études, c’est important !